Ce billet de blog s’intéresse à la nécessité de la création d’un Comité de promotion du dialogue des cultures en Méditerranée à partir d’exemples d’actions dans les secteurs de l’enseignement supérieur et de l’éducation.
L’urgence en Méditerranée, face aux nombreuses crises qui l’agitent, est de chercher à donner un nouveau souffle à la coopération politique. Pour répondre aux défis de cette situation, je propose de renforcer l’attention et l’action portées aux cultures méditerranéennes. C’est paradoxalement parce que nos sociétés s’ouvrent davantage à l’altérité que des mouvements de réactions identitaires surgissent. Il nous faut alors accompagner les jeunes générations dans cette transition culturelle et sociétale qui pose des questions fondamentales sur les orientations communes que nos sociétés devront prendre. Parce qu’elle est l’expression caractéristique et unique du cheminement collectif et individuel des femmes et hommes, la culture ne se limite pas aux productions artistiques mais touche étroitement la forme que nous voulons donner à notre civilisation. Aujourd’hui pourtant, la compréhension et l’emploi de la culture et du dialogue entre les cultures sont soit étriqués, soit « fourre-tout ». Ce sont les cadrages par le sécuritaire, la rentabilité économique et l’expression artistique des jeunes qui prédominent. L’essence même de la culture et du dialogue entre les cultures, explicitée dans un autre article, est oubliée ou mutilée.
Le moment semble venu de donner une impulsion fondamentale à cette problématique avec la mise en place d’un Comité de promotion du dialogue des cultures en Méditerranée (CPDCM). Le but de ce dernier est de parvenir à ce que les Méditerranéens, d’une part forment un noyau d’acteurs directement touchés par les problématiques régionales, et d’autre part, produisent des savoirs communs.
Sur le modèle des comités de bioéthique, le CPDCM serait chargé d’analyser et d’évaluer les projets et les politiques à vocation méditerranéenne. Il veillerait à la représentativité des différents points de vue culturels afin de contrecarrer la domination d’une vision européocentrée. Pour ce faire, il élaborerait des propositions et des plans d’action allant dans le sens de la construction d’un espace méditerranéen véritablement partagé. Des tribunes d’opinions permettront de recueillir les différents avis des représentants culturels. Sa collaboration avec les différentes échelles politiques et sociales engagées créera ainsi une coopération et des synergies à tous les échelons par un partage de leurs idées et expertises. De la sorte, une agora méditerranéenne sera ouverte pour discuter des blocages régionaux aux niveaux historique, politique ou sociétal. Le CPDCM pourrait ainsi devenir un haut-lieu d’apprentissage de la démocratie plurielle.
Proposons un exemple d’application dans le domaine de l’enseignement et de l’éducation. Les initiatives pour unir les Méditerranéens par l’éducation et la culture sont anciennes et quelques peu oubliées. Elles ne bénéficient pas d’une assez forte visibilité ni d’un soutien conséquent. La carte proposée à la fin du texte montre les initiatives les plus manifestes et nous conviendrons aisément que ces dernières se situent encore en terra incognita. Les bases existent pour une mise en commun des compétences et des ressources mais les initiatives sont dispersées et devraient être regroupées sur une unique plateforme numérique que le CPDCM organiserait de façon à proposer des explications, des analyses et des bilans réguliers des différentes actions. Cette plateforme regrouperait aussi les offres de formation en lien avec la problématique du CPDCM et ce dernier se chargerait de leur promotion. Il pourra en somme offrir une meilleure visibilité et cohérence aux résultats obtenus par la fédération de toutes les initiatives qui travaillent à la construction d’un espace commun et d’une conscience méditerranéenne. L’acceptation et la mise en œuvre de programmes d’éducation à teneur méditerranéenne, qui aideraient à lutter contre les esprits tant extrémistes, xénophobes que nationalistes, en seraient facilitées.
Sur le plus long terme, le CPDCM pourrait proposer le lancement d’un programme éducatif méditerranéen pour les plus jeunes qui développerait leur sensibilité à l’interculturalité ainsi qu’un effet de socialisation par l’apprentissage du dialogue et de l’esprit critique. Il serait question d’enseigner dès le plus jeune âge à être Méditerranéen en relevant les particularités de cet espace pour y vivre au mieux. Par exemple, des cours d’histoire et de pensée méditerranéens pourraient être proposés afin de mettre en lumière l’héritage commun aux différents peuples. Également, la question de l’environnement naturel méditerranéen et des menaces auxquelles il est confronté favoriserait l’émergence d’une pensée écologique ainsi qu’une compréhension de la culture comme partie intégrante de la nature.
Ainsi, est-il proposé de passer de la primauté donnée à l’intégration économique à celle de l’intégration culturelle afin de former des générations futures capables d’agir pour leur région et conscientes de l’importance que revêtent ces soft powers dans la détermination des nouvelles voies à emprunter face aux défis du XXIème siècle.
Image: Ema Galifi
Graphe: Ema Galifi