Accord de libre-échange: quelles réponses à donner, et par qui?

International Law

En cette fin d’année, nos parlementaires fédéraux sont amenés à approuver l’accord de libre-échange (ALE) conclu entre la Suisse et la Chine au mois de juillet dernier. Quelles réponses peut-elle donner ? En outre, le peuple peut-il – ou devrait-il – pouvoir se prononcer sur ce texte?

 

La Chine, poids lourd de l’économie mondiale, est un partenaire commercial de première importance. Les échanges économiques avec la Suisse sont nombreux. La mise en place d’un libre échange avec la Chine, avantageuse donc pour l’économie suisse, doit cependant être mise en relation avec la situation des droits de l’homme dans ce pays, problématique à plusieurs égards. Or, la promotion du respect des droits de l’homme et celle des intérêts économiques du pays sont deux objectifs de la politique étrangère suisse placés sur un pied d’égalité et censés se favoriser mutuellement. Les autorités fédérales ne proposent pas de solution concrète ou de raisonnement pouvant résoudre les conflits entre ces deux objectifs. A ce sujet, un papier de discussion foraus intitulé “Légitimer la politique économique extérieure” propose une approche plus cohérente, basée sur l’idée d’un standard minimal de respect des droits de l’homme et d’engagements réciproques pour les deux parties.

Les possibilités de réponse de l’Assemblée fédérale

L’Assemblée fédérale doit régulièrement se prononcer sur des accords de ce type. Le Parlement ne peut qu’approuver ou rejeter en bloc le traité. Or, au vu du contexte de l’accord, on peut regretter ce caractère binaire. Toutefois, une réponse plus nuancée, sous la forme d’un « oui, mais » est envisageable dans les faits. Il est en effet tout à fait possible à un Parlement qui serait favorable à des relations économiques intensifiées avec la Chine mais souhaitant en même temps plus d’engagements en lien avec la situation des droits de l’homme de refuser l’approbation tout en enjoignant le Conseil fédéral de retourner à la table des négociations dans ce but. Une telle approche constituerait une voie médiane entre la solution a priori binaire qui s’offre à l’Assemblée fédérale. A n’en pas douter, les discussions au sein des Chambres en cette fin d’année seront animées.

La question du référendum

Une certaine incertitude plane sur la possibilité du peuple de s’exprimer sur le traité. Le message du Conseil fédéral mentionne la pratique des autorités fédérales qui consistait, jusqu’à récemment, à ne pas soumettre les « accords standards » tels que les ALE au référendum facultatif. Cette pratique a été à raison critiquée et le Conseil fédéral est revenu en arrière pour les conventions de double imposition renégociées ces dernières années. Un retour en arrière également pour les ALE ouvrirait la porte à un référendum facultatif, dans la mesure où l’Assemblée fédérale estime que l’ALE contient des dispositions d’une certaine importance.

On peut même se demander si la soumission de l’ALE au référendum obligatoire ne se justifierait pas. L’Assemblée fédérale a la possibilité de soumettre des traités internationaux au référendum obligatoire si elle estime que leur haute importance politique le justifie. L’ALE conclu en 1972 avec la CEE constitue un exemple de cette pratique. Un tel choix serait justifié pour l’ALE conclu avec la Chine. L’approbation de ce texte fournit en effet une occasion en or pour s’interroger sur l’approche – discutable selon les cas – consistant à croire que la poursuite des intérêts économiques de la Suisse et la promotion des droits de l’homme se favorisent mutuellement et immédiatement. La mise en place d’un standard minimal de référence et d’engagement réciproques constituerait une avancée à cet égard. On ne peut en fin de compte que souhaiter qu’un maximum d’acteurs prennent part au débat.